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• tiran 980; lat. tyrannus, gr. turannos « maître »I ♦1 ♦ Hist. Chez les Grecs, Celui qui s'emparait du pouvoir par la force. Pisistrate, tyran d'Athènes.♢ (XVIIIe) Didact. Usurpateur de l'autorité royale, du pouvoir. « tyran et usurpateur sont deux mots parfaitement synonymes » (Rousseau).2 ♦ Cour. Personne qui, ayant le pouvoir suprême, l'exerce de manière absolue, oppressive. ⇒ autocrate, despote, dictateur, oppresseur. Et les peuples « Oubliant le tyran [Napoléon] s'éprirent du héros » (Hugo). « Tyrans, descendez au cercueil » (Chant du départ). « le pouvoir absolu du tyran finit toujours par le rendre absolument fou » (Tournier).3 ♦ Fig.; Littér. ou plaisant Personne autoritaire qui impose sa volonté, abuse de son pouvoir. C'est un vrai tyran. Quel tyran ! « Mariée avec un vaurien de bonnes manières, un de ces tyrans domestiques devant qui tout doit céder et plier » (Maupassant). ⇒ despote, macho. « L'homme, tyran goulu, paillard, dur et cupide » (Baudelaire). « L'amour est un tyran qui n'épargne personne » (P. Corneille).II ♦ (1775) Oiseau dentirostre (passereaux), gobe-mouche d'Amérique tropicale. ⊗ HOM. Tirant.Synonymes :- despotetyrann. m.d1./d ANTIQ GR Celui qui, à la tête d'un état, exerçait le pouvoir absolu après s'en être emparé par la force.d2./d Cour. Celui qui, détenant le pouvoir suprême, l'exerce avec cruauté et sans respect des lois.d3./d Fig. Personne qui exerce durement son autorité ou qui en abuse. Un tyran domestique.⇒TYRAN, subst. masc.I. A. — HIST. DE L'ANTIQ. En Grèce, Sicile, Italie méridionale, chef politique, généralement d'origine populaire, qui a usurpé le pouvoir dans une cité ou un État libre. Pisistrate, tyran d'Athènes; Denys, tyran de Syracuse; Nabis, tyran de Sparte. À la tête des Trente tyrans paroissoit Critias, philosophe et bel-esprit de l'école de Socrate (CHATEAUBR., Essai Révol., t. 2, 1797, p. 99). C'est un fait général et presque sans exception dans l'histoire de la Grèce et de l'Italie, que les tyrans sortent du parti populaire et ont pour ennemi le parti aristocratique (FUSTEL DE COUL., Cité antique, 1864, p. 447).B. — P. ext.1. [Désigne une pers.]a) Souverain, personne détenant un pouvoir politique, qui exerce une autorité arbitraire et absolue, sans respect des lois et en usant généralement de méthodes oppressives et violentes. Synon. despote, potentat. Tyran cruel; tyran du peuple; subir le joug des tyrans; mort aux tyrans! (cri de la période révolutionnaire). Trente mille Hollandais, appelés par Bonaparte sur la Vistule, ayant absolument refusé d'obéir, il a fait fusiller huit officiers qui apparemment s'étaient montrés un peu trop négatifs; l'armée a persisté dans son refus, de manière que l'atrocité du Tyran ne lui aura valu que de la haine et du danger (J. DE MAISTRE, Corresp., 1807, p. 380). Les tyrans sont les mêmes partout. Écoutez notre Hitler, qui est, lui, le pur militaire selon l'esprit et le cœur de l'état-major (ALAIN, Propos, 1935, p. 1276).— P. métaph. Est-ce que la colombe échappe Au vautour, ce tyran des airs? (DUMAS père, Chev. Maison-Rouge, 1847, I, 2e tabl., 4, p. 25).b) Personne qui, du fait de sa situation, de sa richesse, etc., abuse vis-à-vis de son entourage de son autorité, de son pouvoir (dans le domaine des relations familiales, affectives ou d'une activité professionnelle, sociale, religieuse, etc.). Synon. despote, dictateur. Agir, se comporter en tyran; être le tyran de ses enfants, de son conjoint, de ses subordonnés; être un petit, un vrai tyran; être le tyran du bureau, de la maison; être le tyran des arts, des lettres. Ces femmes sèches ou grasses, altières, sûres de soi, tyrans acrimonieux de leurs maisons, tyrans doucereux de la maison de Dieu (J.-R. BLOCH, Dest. du S., 1931, p. 39). Il suffit de n'importe qui, d'un Voltaire ou d'un Renan, ou de moins encore, si possible, d'un gazetier, d'un tyran de chef-lieu de canton (...) pour dérouter et précipiter dans un marécage inextricable des milliers de pauvres jeunes gens (CLAUDEL, Poète regarde Croix, 1938, p. 264).♦ Tyran domestique. Celui, celle qui manifeste une domination absolue et impitoyable au sein de sa famille. Il y a des tyrans domestiques, mâles et femelles, qui règnent par l'expression, par la manière d'ordonner, de louer, de blâmer (ALAIN, Propos, 1913, p. 159).— P. exagér. et p. plaisant. C'est peut-être une solution qui donnera satisfaction aux dames et à leur tyran, le coiffeur: les cheveux courts le matin et la perruque le soir (STÉPHANE, Art coiff. fém., 1932, p. 158).— Au fém., rare. Méchante, laide, cruelle, tyranne, petit joli monstre! Tu te ris de mes menaces, de mes sottises; ah! si je pouvais, tu sais bien, t'enfermer dans mon cœur, je t'y mettrais en prison (NAPOLÉON Ier, Lettres Joséph., 1796, p. 49).2. [Désigne une réalité concr. ou abstr. qui s'impose d'une manière absolue à l'esprit, aux sentiments, à la volonté de qqn] L'amour, l'argent, les passions sont des tyrans. Ce tyran cruel auquel nous obéissons tous: la vanité (STENDHAL, Abbesse Castro, 1839, p. 142). C'est [la raison] un bon tyran qui veut bien faire le meilleur usage de son autorité souveraine, mais qui la maintient absolument (COUSIN, Hist. philos. mod., t. 4, 1846, p. 591).— En appos. avec valeur d'adj. L'esprit tyran essaie de se cacher à lui-même ces choses; mais l'esprit libre les a depuis longtemps éclairées (ALAIN, Propos, 1932, p. 1096).II. — ORNITH. Passereau d'Amérique de la famille des Tyrannidés, de petite taille, pourvu d'un bec robuste, qui se nourrit d'insectes en vol et qui fait preuve d'un caractère hardi et combattif. Synon. gobe-mouches (d'Amérique). Le tyran intrépide, petit oiseau d'audace extraordinaire, couvre de son abri des espèces plus grosses, qui le suivent et se fient à lui (MICHELET, Oiseau, 1856, p. 222).REM. Tyrannidés, subst. masc. plur., ornithol. Famille d'oiseaux passériformes, de petite taille, qui vivent en Amérique. L'agressivité des Tyrannidés est à souligner, ils attaquent tout Oiseau de proie, Corvidé ou autre, passant sur leur territoire et quelle que soit la taille de l'intrus (Zool., t. 4, 1974, p. 581 [Encyclop. de la Pléiade]).Prononc. et Orth.:[
]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. a) 2e moit. Xe s. tiranz « chef politique despotique et cruel » (St Léger, éd. J. Linskill, 152); déb. XIIIe s. tiran (Chastoiement, éd. A. Hilka et W. Söderhjelm, version B, 2881); b) 1372-74 tirant « celui qui a usurpé la puissance souveraine et qui l'exerce arbitrairement » (ORESME, Politiques, éd. A. D. Menut, 201c); 2. 1778 désigne un oiseau gobe-mouche (BUFFON, Hist. nat., Oiseaux, t. 4, p. 571). Empr. au lat. tyrranus, -i « souverain », « despote, usurpateur », du gr.
« maître absolu », par suite « celui qui usurpe le pouvoir absolu dans un État libre », d'où « tyran, despote », et p. anal. le roitelet, oiseau, cf. lat. sc. tyrannus « id. » (BELON, Hist. de la nature des oyseaux, p. 345). Fréq. abs. littér.:1 657. Fréq. rel. littér.:XIXe s.: a) 4 255, b) 2 198; XXe s.: a) 1 201, b) 1 514. Bbg. DUB. Pol. 1962, p. 436. — QUEM. DDL t. 30.
tyran [tiʀɑ̃] n. m.ÉTYM. V. 1380, « homme cruel, brutal »; tiran, 980; lat. tyrannus, grec turannos, proprt « maître », se disait de Zeus.❖———1 (XVIIe; in Furetière, 1690). Hist. Chez les Grecs, Celui qui s'emparait du pouvoir par la force. || Pisistrate, tyran d'Athènes.♦ (XVIIIe). Didact. Usurpateur de l'autorité royale (→ Despote, cit. 3), du pouvoir. || Mort (1. Mort, cit. 35) au tyran ! (à Bonaparte, le 18 Brumaire).1 Dans le sens vulgaire, un tyran est un roi qui gouverne avec violence et sans égard à la justice et aux lois. Dans le sens précis, un tyran est un particulier qui s'arroge l'autorité royale sans y avoir droit. C'est ainsi que les Grecs entendaient ce mot de tyran : ils le donnaient indifféremment aux bons et aux mauvais princes dont l'autorité n'était pas légitime. Ainsi tyran et usurpateur sont deux mots parfaitement synonymes.Rousseau, Du contrat social, III, X.2 Le terme même de tyrannos (…) n'est pas grec. Il n'implique pas d'abord de nuance péjorative. C'est bien plus tard, au IVe siècle, que les Grecs firent mauvaise réputation à la tyrannie (…) Pourtant le tyrannos se distingue du basileus : par son origine, par son existence et par son caractère éphémère. Le tyran ne se réclame ni du droit divin, ni de l'hérédité, mais fonde son autorité sur la force (…)Yves Béguignon, in Encycl. Pl., Hist. universelle, t. I, La Grèce archaïque et classique, p. 608.2 (V. 1155). Cour. Personne qui, ayant le pouvoir suprême, l'exerce de manière absolue et oppressive. ⇒ Autocrate, despote, oppresseur, potentat. || Ce souverain, ce roi, ce dictateur était un tyran. || La reine était un tyran. || Cruels tyrans (→ Paraître, cit. 31). || Tyran féroce (→ Poignarder, cit. 1). || Lorsque tout tremble devant le tyran (→ Abjection, cit. 1). || « Et les peuples… Oubliant le tyran (Napoléon) s'éprirent du héros » (Hugo; → Empereur, cit. 5). — (Sous la Révolution). Roi. || « Tyrans, descendez (cit. 12) au cercueil » (Chant du départ). || Abattre les tyrans (→ Champion, cit. 5). — Le tyran, personnage de tragédie (→ aussi Hurler, cit. 19; loge, cit. 7).3 Le seul expédient que proposent dans leurs journaux Marat et Fréron, c'est précisément un tyran, un bon tyran, dictateur ou tribun militaire.Michelet, Hist. de la Révolution franç., V, I.4 (…) la terreur est le régime de tous les tyrans.André Suarès, Vues sur Napoléon, XVI.4.1 À chaque degré de la hiérarchie, le problème se pose dans les mêmes termes; du maréchal au caporal, chacun est impuissant, si ses subordonnés, plus nombreux, mieux armés, refusent d'exécuter ses ordres. La Boétie a bien montré qu'il n'était de servitude que volontaire : le tyran n'a pour épier les hommes que leurs yeux et leurs oreilles, il n'a pour les opprimer que les bras qu'ils lui prêtent.Roger Caillois, l'Homme et le Sacré, p. 112.3 (1625). Fig. (Littér. ou plais.). Personne autoritaire qui impose sa volonté, abuse de son pouvoir. ⇒ Despote, dictateur (fig.). || C'est un vrai tyran. || Ses parents, son père, sa mère sont des tyrans (→ Geôlier, cit. 5). — ☑ Loc. Un tyran domestique : une personne qui exerce un pouvoir absolu et cruel dans sa famille (→ Goton, cit. 2). — Un « petit tyran (un enfant) qui asservit son gouverneur » (→ Désobéir, cit. 6). || Une coquette est un tyran qui veut tout asservir (cit. 15). || « L'homme, tyran goulu, paillard, dur et cupide » (Baudelaire; → Esclave, cit. 16). || Chaque moi… (cit. 56) voudrait être le tyran de tous les autres. — Adj. || Les esprits tyrans (→ Race, cit. 15). ⇒ Tyrannique. — Par ext. (Sujet n. de chose). || « L'amour (cit. 7) est un tyran qui n'épargne personne ». || « Honneur (cit. 45), cruel tyran des belles passions ».5 Mon Dieu, que votre amour en vrai tyran agit (…)Molière, Tartuffe, IV, 5.6 La vieillesse est un tyran qui défend, sur peine de la vie, tous les plaisirs de la jeunesse.La Rochefoucauld, Maximes, 461.7 Mariée avec un vaurien de bonnes manières, un de ces tyrans domestiques devant qui tout doit céder et plier, elle avait été d'abord fort malheureuse.Maupassant, Notre cœur, I, I.REM. Tyran (aux sens 2 et 3) s'emploie aussi en parlant des femmes. Cependant la forme féminine tyranne [tiʀan] est attestée (1573, Desportes; XIXe, Hugo, les Misérables).———II (1775, Buffon, selon qui l'oiseau est ainsi nommé à cause de son naturel méchant). Oiseau dentirostre (Passereaux; Tyrannidés), gobe-mouches d'Amérique tropicale.➪ tableau Noms d'oiseaux.❖CONTR. (Du I.) Libérateur, protecteur. — Esclave, faible (n.).DÉR. Tyranneau, tyrannie, tyranniser. — V. aussi Tyrannicide.HOM. Tirant.
Encyclopédie Universelle. 2012.